LE GNAWA, DE L'ESCLAVAGE À L'UNESCO

Le terme gnawa est un genre musical confrérique généralement associé à des paroles à caractère religieux qui invoque les ancêtres et les esprits.

MUSIQUE

Maison Choukrane team

4/28/20233 min read

DES ORIGINES SUBSAHARIENNES

Il existe de nombreuses théories sur la provenance du nom « gnawa ». La plus convaincante et probable est celle provenant des populations chleuh. Ces populations étaient souvent propriétaires d’esclaves subsahariens et ils avaient pour habitude de les appeler igri ignawan. Cette signification berbère signifie le champ des cieux nuageux.

L’histoire nous apprend que les gnawa descendent de ces Noirs que les sultans du Maroc à partir du Saadien Abul Abbas al Mansur ont importés du Soudan après la prise de Tombouctou.

Les chercheurs contemporains admettent qu'il est difficile aujourd'hui d'identifier l'origine des gnawa à partir de leur nom, d'autant plus qu'ils ne sont pas tous noirs, arabes ou musulmans. Il y a également des gnawa berbères et des gnawa juifs.

LA CEREMONIE LILA

Tout d’abord, il y a l’Aâda. Le cortège permet d’ouvrir officiellement la cérémonie car sans lui « la porte ne serait pas ouverte et les esprits ne pourraient pas circuler ».

Place ensuite aux parties sacrées de la Lila durant lesquelles sont invoqués les génies des sept couleurs. Cette session s’appelle le M’louk. Des fumigations de jaoui (encens) sont répandues afin que le Maalem s’en serve dans le but de sacraliser son instrument, le guembri.

Le Maâllem interprète différents chants, chacun d'eux correspondant à une couleur ou à un esprit jusqu'à ce que l'on découvre la couleur qui fasse entrer l'adepte en transe.

Entrevue avec le maâlem Hicham Edaai

Hicham Edaai est né à Agadir au sud du Maroc. Fasciné par les sons qui sortaient du guembri, instrument phare de la musique gnawa, il s’est lancé corps et âme dans l’apprentissage de cet instrument

Maison Choukrane : Racontez-nous comment s’est formée votre troupe Ganga Fusion

Quel rôle avez-vous dans ce groupe ?

Hicham : Ma relation avec la musique gnawa a commencé lorsque j’avais 7 ans. J’ai commencé à apprendre les instruments à cordes traditionnels comme le guembri. Quatre ans plus tard, j’étais encore très jeune lorsque j’ai commencé à me produire, devenir « artiste » à l’école avec des amis qui aimaient cette musique ou qui appartenaient même à des familles Gnaoui.

Avec cette bande d’amis nous avons commencé à participer à des concerts organisés par des établissements d’enseignement. Petit à petit nous sommes devenus professionnels et nous avons choisi le nom Ganga Fusion.

Je suis le fondateur et aussi le maâlem du groupe. C’est-à-dire que je suis le chef de la troupe et que je suis le seul à jouer du guembri. Les autres membres d’une troupe gnawa s'appellent les koyous et sont tous percussionnistes. Ils jouent avec des crotales, ce sont des castagnettes qu’ils entrechoquent par de rapides mouvements, s’alignant sur mon rythme. J'ai mélangé la musique traditionnelle et moderne, en fusionnant le guembri avec des instruments contemporains.

La culture gnawa est reconnue comme étant marocaine, mais s’est-elle exportée ?

Oui, bien sûr ! Il y a de la musique gnawa en Algérie et en Tunisie, mais avec des variantes. En Algérie, le gnawa est connu sous le nom d'Al-Diwan et en Tunisie, sous le nom de Stambali.

La musique Le Gnawa est synonyme de musique ensorcelante et peut amener des personnes dans une transe. Avez-vous déjà organisé et fait partie d’une cérémonie rituelle aussi appelée cérémonie lila ?

Deux années après nos débuts avec la troupe, nous avons décidé d'entrer dans le domaine des nuits, des rituels et du monde des djinns. Nous avons donc commencé à travailler avec des femmes et des hommes se trouvant dans le domaine de la spiritualité et de la préparation de l'esprit.

Il est interdit de filmer ou prendre en photo des soirées de gnawa. Cependant, il existe une vidéo pour en savoir plus sur les rituels de la nuit de gnawa, qui s’appelle « Le Noir, Lila, Gnawa » de Café Matich.

Depuis des décennies de nombreux styles musicaux ont intégré les rythmes gnawas dans leurs registres que ce soit au Maroc ou ailleurs, comme mentionné par Hicham.

Rap marocain, musique arabo-berbère avec notamment Nass el Ghiwan, fusion jazz-gnawa, reggae, blues.

En France : Gnawa Diffusion, l’Orchestre National de Barbès, de nombreux s’en sont largement inspirés. Cette musique ne cesse de se développer et d’être reconnue internationalement